Réformer les fondements du modèle économique
Deuxièmement, l’action du gouvernement visera à réformer les fondements du modèle économique en vigueur depuis la guerre civile. Il est temps de dépasser les slogans sur l’économie de rente, les secteurs productifs et la création d’emplois, pour passer à un plan de travail structuré. On définit un modèle économique en fonction de la répartition des ressources humaines et du capital entre les différents secteurs d’activité et de leur compétitivité sur les marchés internationaux. L’allocation de la main-d’œuvre et des capitaux se produit en fonction de la structure des prix et des coûts du système qui est-elle—même déterminée par les politiques sectorielles, les investissements publics, les mécanismes de distribution et les régimes d’imposition. Des décrets et des ordonnances couvriront l’ensemble de ces champs.
La crise se traduit par une chute brutale simultanée des revenus réels et des prix domestiques. La première est synonyme d’appauvrissement et pousse à l’émigration. Tandis que la seconde pousse à la vente des actifs domestiques aux prix les plus bas. L’expérience prouve qu’il n’y a pas de «correction spontanée» à attendre suite à la chute de la consommation, comme le prétend la pensée néolibérale. Il faudra faire des choix décisifs pendant la phase de transition, pour éviter qu’après avoir imposé des pertes colossales, la phase d’adaptation ne reproduise à terme les mêmes causes de la crise. C’est le sens de notre insistance sur la nécessité de répartir les pertes de façon non seulement équitable, mais aussi pertinente.
Notre objectif est d’éviter l’émigration des jeunes. Cela ne signifie pas que nous ne nous préoccupons pas des plus vieux, mais que s’il y avait à choisir, nous accorderons la préférence aux jeunes. Notre objectif est d’éviter l’effondrement des entreprises en mesure d’exporter. Notre objectif est de conclure des accords commerciaux qui accroissent la demande externe sur nos biens et services d’un côté et renforcent nos capacités productives de l’autre. Nous voulons que la baisse de la valeur des avoirs se traduise par une baisse des coûts de production et des prix à la consommation plutôt qu’elle ne pousse à la liquidation des actifs et à l’émigration.
Il faut bien comprendre qu’il ne sera pas facile de passer d’une économie fondée sur l’exportation de sa jeunesse et la dépendance à une économie robuste. Beaucoup de gens perdront leur emploi et des secteurs entiers seront affectés. Le passage de métiers et de secteurs établis vers d’autres métiers et secteurs n’est pas automatique. Il prendra du temps, celui de l’acquisition des compétences et du changement des habitudes d’emploi et de vie. Nous parlons de notre société et devons la prendre en compte telle qu’elle est réellement, composée d’êtres humains, d’hommes et de femmes, d’instruits et d’illettrés, de pauvres et de riches, de Libanais et d’étrangers aussi. Il n’est pas question de traiter avec des communautés. Cette transition suppose un effort constant et soutenu.
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