À l’attention du Sayyed Hassan Nasrallah : Se retirer en faveur de la vraie opposition sauvera le Liban

30 septembre 2020

Communiqué joint des partis « Bloc National » et « Citoyens et Citoyennes dans un Etat » :

Tout d’abord, nous aimerions rappeler que nous ne sommes concernés ni par ce que dit le président français, ni par l’administration américaine, ni par d’autres en Arabie Saoudite et en Iran. De plus, nous ne sommes pas concernés par ce que vous avez narré au sujet du « club des anciens premier ministres ». Ces derniers étaient vos partenaires au pouvoir, et vous espérez encore des gestes de bonne foi de leur part et un nouveau partenariat avec eux.

Nous, en tant qu’opposition, ne croyons pas dans l’intervention étrangère comme moyen pour résoudre la crise libanaise. Les nations agissent par intérêts et non pas par amitié. Nous sommes convaincus que le Liban doit résoudre ses problèmes par lui-même. Dans l’histoire moderne du Liban, toute ingérence étrangère n’a fait que compliquer la situation. De surcroit, nous possédons au Liban toutes les compétences politiques et administratives nécessaires pour la gestion de la crise.

Lors de sa première visite au Liban, nous avons rencontré le président français Emmanuel Macron. Tout en remerciant le peuple français pour son aide apportée au peuple libanais, nous avons ouvertement adressé le message suivant au président français : « Comment restaurez-vous un pouvoir qui s’est fondé sur la désolation du Liban ? ».

Ce pouvoir, dont votre parti est un des piliers depuis 30 ans, après ses échecs, ses gaspillages, ses partages clientélistes, son confessionalisme, sa subordination à ses parrains externes…a lui-même mené le pays à une ingérence étrangère qui impose ses conditions. Vous avez dit que les groupes parlementaires représentent les confessions, c’est vrai. Ces groupes ne représentent les citoyens que dans la mesure où la peur de ces derniers les uns des autres les divise, et leur besoin de quémander des faveurs en échange de leur loyauté confessionnelle les scinde. Les partis confessionnels ne se nourrissent plus de la distribution des bénéfices. Désormais, ils se nourrissent exclusivement de la propagation de la peur et de l’anxiété.

En ce qui concerne le gouvernement que vous espérez voir naître, celui qui « respecte les coutumes et la volonté populaire », de quelles coutumes et de quel respect de la volonté populaire parlez-vous ? Cela veut-il dire une continuité dans la légitimé confessionnelle du pouvoir et la déception des demandes populaires en appauvrissant les citoyens et les humiliant avec des services clientélistes ? Comment ce pouvoir qui s’auto-renouvelle pourrait-il combattre la corruption comme vous le dites, alors que pendant trente ans il n’a pas pu traduire en justice une seule personne corrompue ? Bien au contraire ce pouvoir a été le facteur principal de prolifération de la corruption, et pour dire le moins de tolérance envers celle-ci, malgré tous les discours, les promesses, les expositions de faits, et les alertes lancées aux autorités compétentes. Nous n’acceptons pas la feuille de route du président Macron, celle que vous avez tous acquiescé, parce qu’elle fait appel à un « gouvernement de mission ». Un gouvernement de mission est l’antithèse d’un gouvernement de transition. Le but du premier est la restauration d’un système déchu, et le retour à un âge d’or illusoire en regagnant la confiance des capitaux externes qui étaient censés être investis dans des secteurs productifs générant ainsi des opportunités de travail. L’objectif du deuxième est d’établir un vrai Etat juste et capable, et de fonder sa légitimité laïque sur la base de la confiance des citoyens.

Reconnaître ses torts est une vertu, et se retirer du pouvoir en faveur de la vraie opposition afin qu’elle puisse former un gouvernement de transition avec des capacités législatives exceptionnelles qui remet le pays sur le bon chemin est preuve de magnanimité. Le Liban et ses citoyens n’ont pas le luxe d’expérimenter des solutions aux résultats prévisibles, lorsque l’effondrement total se dévoile devant nous et le besoin et la disette font des ravages dans chaque quartier et chaque village.

Finalement, vous dites que la raison de votre attachement au pouvoir est la protection de la résistance face à l’ennemi israélien, ainsi que la préservation de l’existence politique de votre confession. Sachez que la vraie protection ne viendra que des libanais eux-mêmes et de la solidarité interne, non pas de l’extérieur, et certainement pas en coupant les liens avec le reste des libanais.